La moule Quagga (Dreissena bugensis) est un mollusque bivalve qui a été observé pour la première fois dans les eaux du Léman en 2015. Depuis lors, sa croissance exponentielle a de forts impacts écologiques et économiques.

La Moule Quagga est présente dans les eaux du Léman jusqu’à une profondeur de 120m et résiste donc à de fortes pressions. Contrairement à la moule zébrée (aussi présente dans le Léman) que l’on retrouve à une profondeur maximale de 35m et qui se reproduit à environ 12°C, la moule Quagga se reproduit à 5°C et résiste à de forts écarts de température. Elle se reproduit ainsi toute l’année dans les eaux du Léman.

Le cycle de vie de ses espèces se séparent en deux phases :

  • La phase planctonique (7 à 28 jours)
  • La phase benthique (3 à 4 ans)

Pendant la phase planctonique, les organismes sont libres et peuvent donc coloniser de nouveaux espaces. C’est durant cette phase que les moules Quagga ont probablement été emmenées dans le Léman. En effet, originaire de la mer noire, la moule Quagga est présente en Europe depuis 2006 et a probablement été transportée par les bateaux avant de se propager rapidement grâce aux courants (la piste des oiseaux migrateurs a aussi été envisagée sans réelle preuve pour l’étayer).

La moule Quagga est une redoutable filtreuse qui se fixe sur tous les supports et qui appauvrit l’ensemble le cycle trophique. En effet, les moules appauvrissent le milieu en plancton ce qui entraîne un déclin des espèces piscicoles planctonophages telles que les corégones. A ce jour, l’impact ne peut pas encore être quantifier, les données sur le Léman n’étant pas encore connues.

Dans le Léman, les pêcheurs ont été gênés par les moules dès 2017 : « ils passent plus de temps à enlever les moules de leurs filets que du poisson » explique Christophe Méchouk, ingénieur expert en traitement de l’eau à la ville de Lausanne. Les moules sont également retrouvées dans les canalisations et au niveau des prélèvements d’eau. En effet, les prélèvements d’eau avaient été dimensionnés pour pomper l’eau à des profondeurs de 40 à 50m ce qui évitait qu’ils ne soient impactés par la moule zébrée mais cela ne s’applique pas à la moule Quagga qui descend à des profondeurs beaucoup plus importantes. En termes de coûts, on estime qu’aux Etats-Unis, la moule Quagga provoque 1 milliard de dollars de frais chaque année. De même, sur la commune de Lausanne, 2 stations de pompage, gérées par la ville, sont touchées par les moules Quagga. Pour la STEP de Saint-Sulpice, cela a entrainé un surcoût de 10 millions de CHF. Dans des cas extrêmes, certains préleveurs d’eau ont dû arrêter l’exploitation.

Différentes stratégies de lutte ont été mises en place pour lutter contre cette espèce : chloration, curage, utilisation de cupronickel (biocide), étude de préfiltration. A Lausanne, une expérimentation sur le curage va être mise en place. Celui-ci va être effectué en fin d’année 2021 puis il y aura une inspection tous les deux mois.  Il faudra sûrement renouveler le curage une fois par an.

Des recherches sont en cours pour lutter « à la source », c’est-à-dire pour limiter la propagation. Des méthodes de lutte biologique sont également en étude. A ce jour, un prédateur connu de ces moules est la loutre. Au service de l’eau de la ville de Lausanne Lausanne, 2 personnes travaillent à temps plein à la rédaction d’un rapport sur la moule Quagga. Des réunions ont également lieu toutes les deux ou trois semaines avec l’OFEV (Office Fédéral de l’Environnement).

 

Présentation de Christophe Méchouk, directeur de la division études et constructions du service de l’eau de la ville de Lausanne.

Crédit photo: Service de l’eau – ville de Lausanne